INSTANCE PERMANENTE: CONFRONTATION DE POINTS DE VUE SUR LA PROMOTION DES DROITS DES AUTOCHTONES, EN PARTICULIER LES FEMMES

unlogo_blue_sml_frPoint de presse, résumé des services d’information de l’ONU sur la seconde journée

Dans ce résumé parmi les interventions citées celle de Maylis Iriart pour Autonomia Eraiki, et le droit de réponse du représentant espagnol.

Plusieurs États Membres ont assuré aujourd’hui, à l’ONU, que leurs pays faisaient preuve de volontarisme pour aider les peuples autochtones à sortir de leur marginalité sociale tandis que de nombreuses organisations représentant ces populations soulignaient, à l’inverse, que leur situation est toujours aussi précaire.  Cette confrontation de points de vue, qui a donné lieu à l’exercice du droit de réponse des pays mis en cause, avait pour cadre le deuxième jour de la session annuelle de l’Instance permanente de l’ONU sur les questions autochtones (UNPFII).  Elle poursuivait ainsi son débat sur les conséquences des activités extractives sur les territoires traditionnels des populations autochtones, avant d’entamer les discussions sur la situation des femmes.

Le représentant de la Fédération de Russie a, par exemple, rappelé que son pays était le plus grand État pluriethnique au monde et souligné que la législation en faveur de ses 280 000 autochtones était constamment améliorée.  Évoquant, à son tour, la situation russe, la représentante de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) a affirmé que la BERD exigeait que des négociations aient lieu avec les populations concernées sur les investissements qu’elle finance, et que l’assentiment préalable de ces populations est requis.  Le défi, a-t-elle dit, touche au respect de cette exigence.

Des représentants d’organisations autochtones ont en effet mis en cause les lacunes de la mise en œuvre des législations censées permettre la promotion des droits des populations concernées.  Tout en se félicitant des excuses formulées par l’Australie et le Canada au sujet des politiques assimilationnistes du passé, les représentants des autochtones ont souvent constaté que la réalité elle-même n’avait guère évolué, particulièrement en ce qui concerne la condition féminine.  La représentante d’une organisation maya guatémaltèque a déploré le caractère surtout « décoratif » que l’État prête aux Amérindiens de souche et a lancé: « Nous ne demandons pas l’aumône.  Nous voulons une société plus juste ».

L’Instance permanente reprendra son débat public demain à 15 heures, la matinée devant être consacrée à une réunion privée au niveau des experts.

MISE EN OEUVRE DES RECOMMANDATIONS DE L’INSTANCE PERMANENTE CONCERNANT LES QUESTIONS SUIVANTES

a) Développement économique et social

–     Rapport d’analyse

–     Rapport de la réunion d’experts sur les industries extractives, les droits des peuples autochtones et la responsabilité des entreprises

–     Rapport des Rapporteurs spéciaux sur les peuples autochtones et les entreprises

b) Femmes autochtones

–     Rapport d’analyse

–     Femmes autochtones urbaines et migrations

c) Deuxième Décennie internationale des peuples autochtones

–     Rapport d’analyse

Déclarations

Mme ELISA CANQUI MOLLO, Membre de l’Instance permanente (Bolivie), a posé un certain nombre de questions aux Rapporteurs de la veille.  Elle s’est d’abord interrogée sur l’évolution de la situation en Équateur et au Brésil.  S’agissant de la Colombie, elle s’est inquiétée du fait que l’on s’y préoccupait beaucoup des otages des groupes armés sans guère se soucier de la condition des autochtones vivant dans les zones contrôlées par la guérilla.

M. HASSAN ID BALKASSM, Membre de l’Instance (Maroc), a indiqué que la deuxième Décennie internationale des peuples autochtones appelait à agir pour la « dignité ».  Cependant, dans certains pays, les déclarations faites en ce sens apparaissent davantage comme des « déclarations d’intention » car, hormis les discours, rien de bien concret n’est fait par les États.  Les responsabilités des gouvernements sont importantes, a-t-il martelé.

Il est revenu sur le partenariat qui doit unir les autochtones et les compagnies minières, en rappelant que dans certains États, les droits coutumiers des peuples autochtones, en matière de propreté foncière, ne sont pas respectés par les gouvernements qui attribuent des terres sans l’accord préalable de ces peuples.  Il faut que l’Instance force ces États à mettre fin à cette compromission avec les compagnies minières.

Continuant sur ce sujet, il a constaté que les développements récents ne répondaient pas aux attentes des peuples autochtones.  La responsabilité des gouvernements est engagée ici, et ils ont le devoir d’agir pour inverser cette tendance afin de refléter les exigences internationales en la matière.  Il a conclu en appelant les États à insérer dans leur Constitution et leur législation nationales, la notion de souveraineté des peuples autochtones sur leurs terres.

M. BARTOLOMÉ CLAVERO SALVADOR, Membre de l’Instance (Espagne), a noté qu’il y avait deux nouveautés en Amérique latine depuis la dernière session: la Colombie s’est prononcée en faveur de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, et le Chili connaît des progrès en matière de droits de ces peuples.  Il a toutefois déploré que ce pays ne reconnaisse pas le droit à l’eau, mais simplement celui à la fourniture de ce bien essentiel.  Concernant la Colombie, il est un peu tôt pour évaluer les conséquences de son changement de position, a-t-il reconnu, en jugeant cependant que toutes les lois ayant spolié les autochtones devront encore être annulées.

M. FAMARK HLAWNCHING, Caucus des peuples autochtones de l’Asie, a indiqué que le principe du consentement préalable des peuples autochtones, dans le cadre des questions relatives à la terre, n’a pas encore été adopté par les États asiatiques.  Des activités telles que les constructions de réseaux routiers ou de grands barrages font perdre leurs droits aux autochtones.  Depuis la dernière session, de nouvelles questions sont nées, telles que la crise économique mondiale qui touche et préoccupe les peuples autochtones, a-t-il dit, en appelant l’Instance à s’y attaquer.  Il a insisté sur l’impact de la crise alimentaire, « très inquiétante » sur des peuples.  Commentant la Déclaration de Paris relative à l’efficacité de l’aide, il a estimé qu’elle ne traite pas des vraies préoccupations des peuples autochtones.  Aussi a-t-il appelé à sa révision et à sa conformité avec les préoccupations des Nations Unies.

M. WILTON LITTLECHILD, Assemblée internationale des peuples premiers, a attiré l’attention sur les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Si le Canada veut véritablement respecter les droits des autochtones, il doit en tenir compte, a-t-il observé.  Les économies autochtones ont été compromises par plusieurs facteurs liés à la croissance et au développement.  De nombreux peuples autochtones n’ont pas accès aux ressources économiques nécessaires, a-t-il ajouté, en incitant l’Instance à exhorter le Canada à agir de manière plus concrète sur le plan économique.  Il a aussi souhaité que le nombre de recommandations exprimées par l’Instance soit réduit afin de les centrer sur les questions essentielles.

Mme BRIGITTE FEIRING (Organisation internationale du Travail (OIT), a expliqué que depuis 2005, l’OIT œuvre à la réalisation de certaines recommandations relatives aux populations autochtones.  Ainsi dans des pays comme le Cameroun, elle a inclus ces peuples dans les Stratégies de lutte contre la pauvreté.  Elle a souligné la nécessité de parvenir à un développement autonome pour ces populations, tout en reconnaissant que la crise actuelle influait négativement sur cette perspective.

Elle a ensuite évoqué la Déclaration de Paris, en estimant que la démarche poursuivie donnait trop de présence et de pouvoirs aux donateurs, en laissant peu de place aux desiderata des autochtones.  Cette tendance à la centralisation de l’aide, est à revoir, a-t-elle estimé.  Le dialogue est essentiel pour que l’aide soit à l’avantage des peuples, et non des États.  Elle a aussi estimé que les indicateurs actuels devaient être corrigés pour être plus précis et donc plus pertinents.

M. ROMAN KASHAEV (Fédération de Russie) a rappelé que son pays était le plus grand pays pluriethnique au monde où cohabitaient plus de 160 peuples, les peuples autochtones faisant partie de cette riche mosaïque avec 46 ethnies, soit 280 000 personnes vivant dans une trentaine d’entités de la Fédération.  La législation russe en leur faveur continue d’être améliorée, a-t-il assuré.  Elle s’inspire des travaux de l’Instance, de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones et de la deuxième Décennie les concernant.  Une Stratégie pour le développement durable pour les peuples du nord de la Sibérie a été définie.  Elle concerne les ressources naturelles et l’enseignement, mais aussi la préservation du patrimoine culturel.  Trois étapes sont prévues entre 2009 et 2025.  La législation fédérale devra être amendée afin de simplifier les applications pratiques de la Stratégie.  Il y a quelques jours, a annoncé le représentant, un décret gouvernemental a été adopté concernant la création de deux listes, une répertoriant les lieux de vie traditionnelle des petites peuplades, l’autre concernant leurs activités traditionnelles.  Des mesures seront prises pour compenser les peuples qui ont subi des dommages liés aux activités économiques.  En outre, des indicateurs ont été définis pour évaluer la qualité de vie des peuples autochtones.

M. SDTEDMAN FAGOTH (Nicaragua) a indiqué que dans son pays le pouvoir régional est important, et que l’État accorde aux populations autochtones un droit de propriété véritable sur leurs terres et sur leurs ressources minières notamment.  De plus, les femmes ont autant de pouvoir que les hommes et des programmes ont été mis en place pour assurer leur pouvoir économique.  Il a conclu en saluant le rôle joué par le « révolutionnaire »  Daniel Ortega, qui était « un ami des populations autochtones ».

M. JORGE NAHUEL, Confédération Mapuche, a estimé que les activités minières et extractives menaçaient tous les peuples autochtones du monde.  Les États donnent des concessions de façon arbitraire et sans consulter les autochtones.  Le peuple Mapuche est menacé en Argentine par les concessions accordées à des entreprises, tout comme les peuples autochtones de Colombie, a-t-il indiqué.  Il a suggéré que l’Instance consulte les communautés autochtones, en tenant compte d’un certain nombre de facteurs.  Ce sont les peuples affectés qui doivent prendre notamment en main les études d’impact.  La Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones doit être systématiquement prise en compte.  Les communautés concernées doivent donner leur assentiment sur la base d’une information complète quant aux retombées des activités minières susceptibles de toucher leur territoire.  L’Instance devrait aussi, a-t-il ajouté, exhorter les États à prendre en considération l’impact culturel éventuel des activités économiques, en s’inspirant en particulier de la Convention sur la biodiversité.  Par ailleurs, des études d’impact sont nécessaires sur la pollution au cyanure, en particulier dans les zones aurifères.  L’exploitation de mines à ciel ouvert doit enfin être interdite car elle provoque une pollution inévitable.

M. EGBERTO TABO, représentant des peuples de l’Amazonie, a affirmé que l’État du Pérou mène des activités contre le peuple amazonien de cette partie du monde.  Les mesures que ce pays prend contre ce peuple doivent cesser.  Aujourd’hui, le Gouvernement passe des contrats avec des compagnies pour exploiter les terres et les ressources, sans le consentement préalable des populations autochtones.  La construction d’infrastructures lourdes détruit l’écosystème et les terres, en violation flagrante des droits des peuples autochtones.  La perspective de privatiser l’eau est inquiétante, a ajouté le représentant, avant de condamner la position des États qui refusent de faire de l’eau un droit.  Les Nations Unies doivent inclure ce droit dans la question de l’autodétermination, a-t-il proposé.

Mme GABRIELA GARDUZA ESTRADA (Mexique) a attiré l’attention de l’Instance sur le fait que son pays avait augmenté les budgets en faveur des peuples autochtones, de plus de 13 millions de pesos en 2001 et de plus de 38 millions cette année.  Ces efforts considérables n’exonèrent pas le Mexique de les poursuivre car il y a encore pas mal de chemin à parcourir entre l’engagement et la réalisation des objectifs, a reconnu sa représentante.  Le Mexique attache une grande importance aux OMD que le Gouvernement prend systématiquement en compte dans tous les projets pertinents, a-t-elle assuré.  Elle a appuyé la conclusion du document concernant la réduction du nombre de recommandations de l’Instance afin de faciliter leur mise en œuvre.

M. GERSON H. KAMATUKA (Namibie) a estimé que le terme « peuples autochtones » n’est pas approprié car, en Afrique en particulier, les populations sont toutes autochtones.  Il y a cependant, a-t-il reconnu, des populations marginalisées pour lesquelles le Gouvernement namibien met en place des projets, notamment en matière d’agriculture, de pêche et d’éducation.  Le représentant a affiché la détermination de son pays à accentuer ses efforts en faveur de ces populations dans les limites des ressources disponibles.  En ce sens, il a remercié les organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et des partenaires au développement comme la Chine, pour le soutien qu’ils apportent à son pays.

Mme MICHAELA BERGMAN, Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), a évoqué la situation des autochtones de la Fédération de Russie et a affirmé que la BERD exigeait toujours que des négociations aient lieu avec les populations concernées par ses investissements économiques et que leur assentiment était requis.  Le défi, a-t-elle reconnu, touche au respect de cette exigence.

M. JITEN YUMNAM, Forum pour les perspectives des autochtones en action-APIYN, a indiqué que les divers projets hydroélectriques et énergétiques menés en Inde actuellement entrainent des inondations de terres pour lesquelles les populations autochtones ne sont pas indemnisées.  Il a dénoncé l’absence de responsabilisation des entreprises qui fait beaucoup de dégâts.  Il a aussi dénoncé les confiscations de terres dont sont victimes les populations autochtones.  Récemment, a affirmé l’orateur, le Gouvernement indien a signé un accord de libre-échange sans s’enquérir du consentement préalable des populations concernées et sans étudier les effets de ces accords sur leurs droits.  Le Gouvernement de l’Inde doit respecter ce principe et travailler à l’élimination de la discrimination raciale dont sont victimes les autochtones, notamment dans l’État de Manipour.

M. LISANDRO MARQUEZ, Organisation régionale des peuples indigènes de l’État de Zulia, représentant les peuples indiens du Venezuela, a souligné que sans terre, on ne pouvait parler de développement durable ni d’identité pour les peuples autochtones.  Il s’est félicité de la volonté politique en œuvre dans son pays, la nouvelle Constitution prenant les peuples autochtones en compte, grâce aux efforts du Président Hugo Chavez.  Nous pensons que nos ressources naturelles ne doivent pas être endommagées car c’est la garantie de la survie de ces populations, a-t-il ajouté.  Le Venezuela est un exemple à l’instar de la Bolivie, a-t-il assuré.  Nous résistons depuis 500 ans, a-t-il ajouté, dénonçant les États qui ne respectent pas leurs populations autochtones.  Patrie, socialisme ou la mort, nous vaincrons, a-t-il conclu, en transmettant ses salutations révolutionnaires à l’assemblée.

M. JOHN SCOTT, Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique (CBD), a présenté les grandes lignes de la réunion qui a eu lieu entre son organe et les acteurs de l’industrie pharmaceutique.  Il a d’abord relevé que l’industrie des cosmétiques et des parfums faisait un chiffre d’affaires de 4 milliards de dollars par an, et que les communautés locales qui en sont les premiers fournisseurs, ne bénéficient pas de cette manne.  La réunion entre cette industrie et le Secrétariat avait pour but de fournir des recommandations pour améliorer la relation entre les deux parties.

Il a appuyé les bonnes pratiques qui naissent, notamment entre l’Instance et l’industrie pharmaceutique et qui visent à protéger, à valoriser le savoir des autochtones et à leur permettre d’aller vers une autonomisation réussie.  Cette initiative est une démarche « ecoresponsable » qui stimule les relations entre les autochtones et le secteur privé, a-t-il dit, avant d’affirmer la volonté de son Secrétariat de travailler à la mise en œuvre de la Déclaration de 2007.

Mme TARCILA RIVERA, Enlace continental de Mujeres indigenas – Region Sud América, s’est exprimée au nom des femmes autochtones, soulignant leur rôle essentiel et le fait qu’elles soient « dépositaires de notre culture ».  Regrettant que cela ne soit pas reconnu, elle a voulu que la situation de ces femmes soit mieux prise en compte dans les efforts visant à réaliser les OMD.  Nous demandons à l’Instance d’intervenir auprès des États pour que le rôle économique des femmes autochtones soit valorisé.  Nous demandons aux États que le consentement libre et préalable des autochtones aux investissements économiques soit une réalité dans nos pays, a-t-elle ajouté.

Mme TRISHA RIEDY, Institut des Nations Unies pour l’Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR), a rappelé que son Institut a des programmes de formation destinés aux populations autochtones pour renforcer leurs capacités, en particulier les négociations sur les questions qui les concernent, telles que les conflits fonciers ou encore les enjeux politiques et économiques.  L’UNITAR cherche à associer aux programmes les femmes autochtones qui, à ce jour, représentent 40% des stagiaires.  Nous souhaitons les intégrer dans la recherche de solutions aux questions sur leur qualité de vie dans les environnements où elles vivent, a-t-elle conclu.

Mme ANNELIE FINCKE, Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN), a évoqué le quatrième congrès de son organisation qui s’est tenu en octobre à Barcelone et qui a rassemblé 8 000 participants.  Il s’est agi du premier congrès depuis l’adoption de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones qui a d’ailleurs été au centre des débats.  Le congrès a pris des décisions concernant les territoires qui doivent être considérés comme appartenant aux autochtones et gérés par eux sur la base du droit à l’autodétermination.  Appelant les États à aider les autochtones à protéger leurs territoires, la représentante a insisté sur les droits fonciers des autochtones.  Les plans élaborés dans le monde ne tiennent pas assez compte de la vulnérabilité des peuples autochtones, a-t-elle observé.  Le renforcement des capacités est essentiel pour assurer le respect des droits des peuples autochtones.  Il reste beaucoup à faire à cet égard et l’UICN a l’intention de privilégier une approche « droits de l’homme » dans toutes les questions liées à la situation des autochtones.

Mme ISABEL HERNANDEZ CASTRO, Organisation des Mayas, a demandé des actions concrètes et structurelles pour parvenir au respect des droits des autochtones, notamment le droit d’être consultés sur toutes les questions les touchant.  « Nous ne demandons pas l’aumône.  Nous voulons une société plus juste », a-t-elle martelé.  Au Guatemala où les autochtones constituent pourtant la majorité, « notre présence est méconnue par l’État sinon comme un élément décoratif », a-t-elle dénoncé.

Les populations autochtones connaissent les plus tristes records de mortalité infantile et maternelle et ont les plus faibles taux en matière d’éducation.  Nous nous heurtons aussi au facteur économique, a ajouté la représentante, en expliquant que les terres des autochtones avaient été vendues aux entreprises privées dans le cadre de l’économie néolibérale, sans que soient prises en compte les aspirations des populations concernées.

Mme HILARIA SUPA HUAMAN, Députée autochtone au Parlement péruvien et Vice-Présidente du Parlement indigène des Amériques, qui a précisé qu’elle représentait le peuple quechua du Pérou, a d’abord prononcé dans sa langue une prière en mémoire des ancêtres.  Elle a dénoncé la pollution résultant des activités minières qui affecte douloureusement la santé des populations.  Nous évoquons incessamment ces questions sans constater aucun progrès, s’est-elle impatientée.  Le Pérou est divisé en deux, a-t-elle observé, les autochtones étant des citoyens de seconde zone dont les droits sont violés.  Elle a dénoncé l’absence de respect envers « Mère Nature qui nous a donné la vie ».

L’homme blanc ne sait pas respecter sa mère, a-t-elle dénoncé, contrairement aux autochtones.  Elle a demandé qu’une recommandation soit faite afin que soit prise en compte la Déclaration sur les droits des peuples autochtones dans les législations nationales, ainsi que la Convention 169.  Elle a évoqué la peine avec laquelle elle parlait de ce qui se passe dans son pays.  L’Amazonie, poumon du monde, est en train de mourir avec ses enfants.  L’extraction minière dans les Andes se fait de telle manière que l’on semble ignorer que nous existons, voire même que l’on a affaire à des êtres humains, a-t-elle encore dénoncé.

Mme GLORIA ARAMOS PRUDENCIO, Congrès du Pérou, a expliqué que les populations autochtones sont considérées, dans son pays, comme des populations arriérées qui ne peuvent contribuer au développement du pays.  Elles méritent pourtant plus de respect, a-t-elle soutenu.  L’expansion anarchique des explorations minières a fait que des milliers d’hectares de terres en Amazonie sont attribuées, sans se préoccuper de l’impact sur les populations autochtones.  Les sociétés transnationales ne respectent de toute façon pas les engagements qui leur sont imposés.

La représentante a aussi estimé que le traité de libre-échange entre le Gouvernement péruvien et les États-Unis n’avait pas pris en compte la volonté des peuples autochtones.  Elle a annoncé qu’en juillet prochain, la Commission multipartite du Pérou doit approuver un rapport sur le principe de la consultation préalable.  Une fois que cette avancée sera faite, elle a dit espérer que les institutions bancaires internationales en tiendraient compte.  Elle a aussi annoncé que son groupe demanderait également au Gouvernement péruvien d’abroger les décrets qui ne respectent pas le contenu de la Convention 169 de l’OIT.

Mme LEIA BEZERRA DO VALLE, Fondation nationale pour les questions autochtones du Brésil, a évoqué les récentes dispositions prises par le Gouvernement brésilien en faveur des autochtones, dans lesquelles deux plans nationaux destinés aux femmes ont été définis.  Elle a évoqué par ailleurs des séminaires consacrés aux femmes autochtones en présence de représentantes venues de toutes les régions du pays aux côtés d’anthropologues.  Ces efforts ont contribué à réaffirmer l’identité des femmes, a-t-elle affirmé.

Mme ELIZABETH SANDERSON (Canada) a expliqué que son pays se donne pour ambition de faire disparaître les obstacles qui se dressent devant les femmes autochtones en matière économique, sociale et politique, afin qu’elles puissent jouir des droits offerts à toutes les femmes au Canada.  Elle a ensuite présenté le programme canadien établi en ce sens, lequel repose sur trois piliers, à savoir, la recherche de prospérité pour ces femmes, leur participation à la démocratie et l’élimination de toutes formes de violence à leur égard.

Le Canada intègre les femmes autochtones dans ses programmes en matière d’analyse sur le genre, notamment.  Comme le recommande l’Instance, le Canada prend des mesures pour que les femmes aient des soins de qualité.  Le Gouvernement s’attaque aussi à la lutte contre les violences faites aux femmes, en soutenant diverses initiatives comme celles de l’Association des femmes autochtones du Canada.  De plus, en mars 2008, le Canada a annoncé la construction de nouveaux refuges pour les femmes subissant des violences.  En juillet 2008, a-t-elle conclu, il y a eu abrogation de l’ancienne loi canadienne sur les droits de la personne, dont certaines dispositions ne pouvaient être invoquées par les autochtones devant les tribunaux.

Mme LILIANE MUZANGI MBELA, Membre de l’Instance (République démocratique du Congo (RDC), a souligné que les femmes autochtones des forêts tropicales, qui fuient la guerre, étaient fréquemment victimes de viols.  Elle a exprimé l’espoir que la session permette d’élaborer des textes efficaces qui condamnent fermement ces actes « ignobles qui semblent devenir une deuxième culture ».  Ces violences menacent directement la survie des populations, a-t-elle conclu.

Mme MONICA ALEMAN, Forum international des femmes autochtones, a présenté le rapport établi par son groupe, en mettant en exergue les propositions.  Ainsi, a-t-elle dit, le Forum milite pour l’institutionnalisation de l’inclusion de la perspective sexospécifique dans toutes les activités de l’Instance.  Il propose également l’organisation de réunions entre les femmes et les membres de délégations présentes aux rencontres.  Il propose aussi de donner à la session de 2010, le thème « les peuples autochtones et la santé », en mettant l’accent sur la santé reproductive.  Mme Aleman a enfin suggéré la mise en place au sein de l’Instance d’un processus d’examen périodique sur le respect des droits des femmes autochtones.

Mme YOLANDA TERAN, Global Indigenous Women Caucus, a dénoncé les pratiques visant à évincer les populations de leurs terres traditionnelles après des accords commerciaux, sous le prétexte fallacieux de l’insécurité.  Des milliers de femmes ont dû ainsi migrer vers les villes où elles sont victimes de discrimination.  Si ce sont elles qui sont d’abord touchées, c’est toute leur communauté qui en subit ensuite les conséquences.  La représentante a suggéré que l’Instance demande au Rapporteur spécial de se pencher sur la situation de ces femmes migrantes qui sont confrontées à des difficultés encore plus grandes.

Droits de réponse

Le représentant de la Colombie a expliqué que s’agissant des recommandations faites à la septième session par l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones, son gouvernement avait pris des mesures pour éviter les discriminations à l’égard des femmes autochtones.  Mais cette discrimination, qui continue encore, n’est pas une action délibérée, mais une conséquence culturelle, a-t-il affirmé.  L’État colombien ne ménage pas ses efforts pour y mettre fin et pour apporter son soutien à ses femmes, et aux enfants.

Il a souligné, en outre, qu’en Colombie, il s’agissait avant tout de revendications collectives, et non individuelles.  Et dans ce cas, chaque membre de la communauté a un rôle à jouer, a-t-il indiqué.

Il a par ailleurs affirmé tenir compte de la volonté de la participation souhaitée par les femmes au sein de la Commission spéciale existant dans son pays.  Il a aussi rappelé que son gouvernement avait mis en place une politique de quotas en 2001, et que des mesures avaient été prises par rapport aux propositions faites par les femmes autochtones, a-t-il conclu.

Le représentant du Chili a indiqué à l’intention de l’OIT que son pays avait lancé des consultations avec les autochtones.  Cela s’est fait en deux phases, par lettres, et lors de réunions.  Plus de 1 500 personnes ont participé à cette concertation et l’opinion des communautés et des organisations sera intégrée dans un document de synthèse qui sera soumis au Congrès national, a-t-il précisé.  L’exploitation de l’eau et des ressources souterraines relève de l’État chilien, et tous les Chiliens, y compris les autochtones, sont censés en tirer profit, a-t-il rappelé.  La Convention 169 de l’OIT mentionne la question des ressources naturelles et la consultation des autochtones est aussi prévue, à cet égard.  Seul le dialogue permettra d’édifier une société meilleure, a-t-il conclu.

Suite des déclarations

Mme ELLEN GABRIEL, Femmes autochtones du Québec, a dénoncé les discriminations subies par les femmes autochtones qui empêchent l’intégration sociale des populations autochtones et qui rendent impossible la survie de leur l’identité et de leur culture.  Tout en se félicitant des excuses que le Gouvernement canadien a présentées en 2008 aux Amérindiens arrachés de force à leur famille, la représentante a constaté que, pour accélérer leur assimilation, rien n’avait réellement changé dans la situation concrète des autochtones au Canada.  Elle a appelé le Gouvernement canadien à entériner la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones.

M. THOMAS ASCAK JUUSO, Organisation des jeunes peuples samis de la Finlande, a évoqué les questions urbaines qui préoccupent les jeunes et les femmes appartenant au peuple sami.  L’exode rural a eu des effets négatifs sur les femmes restées dans les campagnes qui ont désormais du mal à faire face aux travaux d’élevage.  En outre, l’augmentation du nombre de Samis dans les villes pose le problème de la sauvegarde de leur culture.  À ce défi, s’ajoutent ceux de la sauvegarde des connaissances traditionnelles et des savoirs ancestraux, a encore expliqué le représentant.  Ce peuple, a-t-il poursuivi, prétend aux mêmes droits que les autres composantes de la société finlandaise dont l’État devait assumer sa responsabilité en la matière.

Le représentant a néanmoins reconnu que l’État avait pris des mesures pour améliorer l’éducation des jeunes samis.  L’appelant à poursuivre cette politique, il a lancé un appel urgent aux jeunes samis dont près de 70% vivent en dehors du cadre familial, pour qu’ils travaillent à la sauvegarde de leur culture.  Les femmes et les filles doivent veiller à la préservation de l’identité de « la femme traditionnelle » et contribuer à la diffusion de leur culture car c’est cette diffusion qui permettra la pérennité de la culture samie, a-t-il soutenu.

Mme DOLORES MARTIN (Espagne) a estimé essentiel de diffuser les recommandations de l’Instance auprès des acteurs non étatiques.  Elle a évoqué le travail de sensibilisation des entreprises espagnoles qui travaillent en Amérique latine.  Elle a affirmé que l’Espagne appuyait les organisations de femmes autochtones afin de les aider à surmonter les inégalités dont elles sont victimes.  Elle a rappelé que son pays avait ratifié la Convention 169 de l’OIT.

Mme AMY MUEDIN, Organisation internationale pour les migrations(OIM), a expliqué qu’en Asie, les femmes autochtones n’échappent pas au phénomène des migrations.  Victimes de la traite des êtres humains, elles se trouvent être les personnes les plus vulnérables de la société et plus exposées à l’exclusion.  La représentante a souligné que leur arrivée dans les villes répond bien souvent à une volonté de trouver un emploi et de meilleurs soins médicaux.  Ces autochtones n’abandonnant pas leur identité, la distinction entre autochtones urbaines et autochtones rurales est peu pertinente, a expliqué la représentante.  Alors que les migrants font face à des défis communs, les femmes autochtones sont en plus confrontées aux discriminations du fait de leur identité.  Mettre fin à ces discriminations exige la mise en place de politiques à dimension sexospécifique.  La représentante a conclu en attirant l’attention sur le Guatemala qui a adopté des mesures de lutte contre la traite des êtres humains.

M. SARAH FORTUNÉ, Internationale touarègue, a rappelé que la grande majorité, soit 85% des populations touarègues, vivait en milieu rural.  Les recommandations classiques autour du renforcement des capacités sur les droits des peuples autochtones n’intéressent qu’une infime partie de cette population, à savoir celle des villes, a-t-elle noté, en conséquence.  Elle a mis en cause des phénomènes tels que la répression de l’armée nigérienne ou la pollution radioactive de l’espace touareg.  Une pollution, a-t-elle expliqué, qui a provoqué des besoins en matière de santé « sans réponses appropriées en termes d’infrastructure, tant cette réalité est niée par les soignants salariés par les industries extractives ».  L’Internationale touarègue demande qu’un organe extérieur et indépendant établisse un rapport sur la santé des populations et souhaite que l’Instance pose la question de la démilitarisation de la zone pour permettre la libre circulation des personnes à la recherche de pâturage, a conclu la représentante.

Mme DOT HENRY, Caucus des ONG australiennes-Comité de l’égalité des chances d’Australie, a appelé à une meilleure représentativité des femmes en politique et à l’élimination de la violence à l’égard des femmes et des enfants.  Elle a aussi plaidé pour l’élargissement de l’accès des femmes autochtones à la justice.  L’État doit apporter une assistance concrète à ces femmes, a-t-elle insisté, tout en reconnaissant néanmoins que le Gouvernement australien avait commencé à fournir cette aide.  Mais beaucoup reste à faire, a-t-elle ajouté, en se réjouissant tout de même des excuses nationales présentées par l’État australien aux populations autochtones spoliées.  Le Gouvernement doit s’attaquer plus fermement aux maux qui touchent aussi les femmes, comme l’alcoolisme.

M. MARCO ANTONIO CURRUCHIC(Guatemala) a noté que 46% des recommandations de l’Instance n’avaient pas été mises en œuvre ou qu’elles n’avaient fait l’objet d’aucune information.  Des progrès ont toutefois été obtenus au Guatemala, auprès notamment de l’organe chargé de la protection de la femme autochtone qui a pour but d’appuyer les politiques publiques en sa faveur.  Des cours de formation ont en outre été organisés pour prévenir la violence contre les femmes.  Le but ultime est de promouvoir l’égalité entre les sexes, tout en respectant la culture des populations autochtones.  Le représentant a estimé que l’on ne tenait pas suffisamment compte de la langue maternelle de ces femmes et de leur culture.  Très récemment, une campagne a été lancée pour la protection des droits des femmes autochtones, un effort qui s’est fait avec la participation du Commissariat guatémaltèque aux droits de l’homme.  Parmi les objectifs de la politique du Gouvernement, figure une « conscientisation » de la société guatémaltèque afin d’éliminer le racisme et la discrimination dont sont victimes les peuples autochtones du Guatemala, en particulier les femmes.

M. GONZALO OVIEDO, Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN), a jugé nécessaire que les femmes autochtones soient incluses dans les stratégies relatives à la protection de la nature.  L’IUCN a en effet comme objectif d’assurer une représentation accrue de ces femmes dans les activités qu’elle organise.  L’Union vient d’ailleurs de les intégrer à ses discussions, en Amérique latine, lesquelles ont abouti à une étude sur la participation des femmes aux processus de prise de décisions.  M. Oviedo a expliqué que l’UICN veut promouvoir l’égalité des sexes dans tous les problèmes liés à la protection de la biodiversité.  Il faut dynamiser les capacités des femmes afin de leur permettre de mieux soutenir leur famille et leur communauté, a-t-il conclu.

Mme BEVERLEY JACOBS, Association des femmes autochtones du Canada, a évoqué les politiques assimilationnistes et génocidaires menées dans le passé de son pays.  Elle a dénoncé les violences subies par les femmes, donnant un certain nombre de chiffres à cet égard.  Si les mesures à prendre ont été identifiées, un plan national s’impose, a-t-elle souligné.  Il convient de prendre des mesures pour régler les causes sous-jacentes de cette situation, qui sont en premier lieu la misère et la marginalisation sociale.  La représentante a énuméré un certain nombre des recommandations faites par les instances internationales dont celles du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) et du Forum international des femmes.  Elle a engagé les organes pertinents de l’ONU à procéder à leur propre évaluation.

Mme JENNIFER AWINGAN, Forum pour les perspectives des populations autochtones, a brièvement demandé à l’Instance de prendre des mesures concrètes pour aider les femmes autochtones migrantes à réussir leur vie en milieu urbain.  Elle a expliqué que celles-ci faisaient face à une multitude de problèmes auxquels les États devaient répondre et sur lesquels devrait se pencher l’Instance.

Mme KATHLEEN MCHUGH, Assemblée des premières nations, a indiqué que son organisation s’opposait au projet de loi en discussion au Canada concernant les populations autochtones et qui a pâti, selon elle, d’un manque de concertation, contrairement aux affirmations du Gouvernement.  Elle lui a demandé de surseoir à tout texte ne recueillant pas l’assentiment préalable des populations autochtones.

M. DENIS VOLLANT, Nation inuit, a expliqué que la deuxième Décennie internationale doit amener les autres peuples à considérer les autochtones comme des êtres égaux.  C’est la colonisation qui a été à l’origine d’une nouvelle histoire qui a conduit à la marginalisation des peuples autochtones et de leurs savoirs.  En dépit des excuses présentées par son Premier Ministre, le Canada, a dénoncé la représentante, n’a toujours pas signé la Déclaration de 2007.  Évoquant l’importance de l’éducation pour les autochtones et singulièrement les jeunes, il a indiqué qu’une école autochtone reçoit une allocation de 30% inférieure à celle que le Gouvernement offre aux autres populations.  L’éducation des peuples autochtones est sous-estimée et le Gouvernement poursuit sa politique d’assimilation, a encore dénoncé le représentant.  Il a fait appel à la « dignité et à l’honneur » du Gouvernement pour qu’il signe la Déclaration des Nations Unies.

Mme NAIT SID KAMIRA, Collectif des femmes du printemps noir de Kabylie, a souligné que la femme amazighe était reléguée dans les rôles de second plan, alors que par le passé, elle était pleinement respectée dans la société traditionnelle.  Aujourd’hui, cette femme lutte contre le Code de la famille en Algérie qui est largement inspiré par la charia.  La femme kabyle n’a jamais cessé de se battre pour faire respecter ses droits, a-t-elle souligné, et si elle a gagné du terrain, c’est grâce à son combat qui a conduit à l’amendement de la loi sur la famille.  Aujourd’hui c’est le combat sur l’abrogation de ladite loi qui se poursuit, a-t-elle souligné, en indiquant que son Collectif demande l’autonomie de la Kabylie et la reconnaissance par le Gouvernement algérien de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.

Mme TARCILA RIVERA, Femmes autochtones de la région d’Amérique du Sud, a appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à signer la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones de 2007.  Il faut, a-t-elle dit, respecter les cultures autochtones, leurs identités, leurs territoires, mais aussi promouvoir le multilinguisme.  Les États concernés doivent aussi appuyer les femmes autochtones pour éviter qu’elles ne tombent, par exemple dans la prostitution ou l’alcoolisme.  La représentante a plaidé pour la promotion des rapports interculturels.

Mme MAILIS IRIART, Autonomie basque, a rappelé que son peuple était divisé entre deux pays puissants et a estimé que malgré la ratification par la France de la Charte sur les langues minoritaires, ce pays continuait de nier l’existence d’un peuple autochtone sur son territoire alors qu’il est le plus ancien d’Europe.  Le manque de reconnaissance nous porte préjudice à bien des niveaux, a-t-elle ajouté.  Dépendant des institutions éducatives de l’État français, nous ne pouvons suivre nos études en basque et au Pays basque, a-t-elle dénoncé.  Lorsque nous revenons diplômés, nous constatons que les politiques touristiques et l’installation des retraités aisés ont entraîné la spéculation et la rareté des terres.  La France nous inflige une politique de manipulation territoriale, oubliant que le droit au logement est un droit pour tous, a ajouté l’oratrice.  Nous déplorons que toutes nos demandes de reconnaissance soient ignorées ou caricaturées, a-t-elle dit, dénonçant la « folklorisation » de son peuple basque ainsi que la multiplication des poursuites judiciaires.  Elle a enfin dénoncé la collaboration policière franco-espagnole sous couvert de lutte antiterroriste.  Elle a demandé à l’Instance de faire en sorte que la France reconnaisse l’existence du peuple autochtone basque sur son territoire.

Mme MARGARETH CONNOLLY,Retrieve foundation, a expliqué que son peuple est décimé par le VIH/sida.  Alors que les connaissances ancestrales disparaissent, les industries pharmaceutiques tirent des bénéfices énormes.  Pourquoi condamner tout un peuple à la maladie? s’est-elle interrogée.  Elle a conclu en appelant les membres de l’Instance à respecter le rite du « feu sacré » et à allumer un feu, le neuvième jour du neuvième mois de cette année 2009.

M. JOSEFINO MARTINEZ HERNANDEZ, Habitat Pro, a souligné que les migrantes autochtones de la communauté triquie au Mexique avaient uniquement accès aux emplois de femmes de ménage, étant donné que leur droit à l’éducation n’est pas respecté.  Un Institut national de la femme d’Oaxaca a été créé, suivant en cela les recommandations de l’Instance.  Toutefois, a estimé le représentant, l’Instance devrait faire en sorte que soient incluses dans les dispositions relatives au droit du travail des mesures de protection des employés de maison, notamment des femmes autochtones.  Le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM) devrait mener une étude sur les conditions de travail des femmes autochtones afin de recueillir des données permettant l’élaboration de mesures en leur faveur, a-t-il conclu.

Mme MARGARETH LOKAWUA, Caucus Afrique, a estimé que l’Instance a un rôle prioritaire à jouer dans la promotion et l’amélioration du rôle des femmes autochtones dans le développement socioéconomique.  Elle a salué l’implication de l’ONU en la matière, et appuyé à l’avance les recommandations qui seront faites par l’Instance en faveur des femmes autochtones.

M. TONYA GONNELLA FRICHNER, Membre de l’Instance (États-Unis), a souligné que les migrations massives des autochtones vers les villes devraient être considérées comme des « déplacements », au sens juridique du terme.  Elle a dénoncé l’exploitation économique et sexuelle des femmes autochtones et jugé important que parmi les recommandations que fera l’Instance, soient reconnus les droits fondamentaux des femmes autochtones, notamment celui de vivre à l’abri de la violence.

M. ARMON MCKENZIE, Membre de la Nation inuit du Canada, a expliqué qu’en plus d’appeler le Canada à signer la Déclaration de 2007, il vient l’appeler à accorder plus de respect à l’environnement.  Il a rappelé qu’au Guatemala, des manifestations ont eu lieu contre les opérations minières canadiennes tout comme aux Philippines.  À ce jour, ce Gouvernement n’a toujours pas encore appliqué les recommandations sur les normes obligatoires établies par les différentes commissions du pays qui ont planché sur les pratiques de compagnies minières, a dénoncé l’orateur.  Il a appelé l’Instance à engager le Gouvernement canadien à adopter une loi relative à l’industrie minière qui serait plus efficace et plus respectueuse de l’environnement.

Mme RICKY TRAN (Fédération khmère krome) a constaté que les OMD ne seraient jamais réalisés dans un pays comme le Viet Nam si les peuples autochtones du delta du Mékong ne sont pas reconnus.  Le Viet Nam doit reconnaitre les Khmers Kroms, a-t-elle insisté, en sollicitant l’implication d’une institution comme la CEDAW pour évaluer les progrès accomplis.  Elle a aussi estimé nécessaire la création d’un enseignement bilingue afin que les Khmers Kroms puissent préserver leur culture.  Depuis six ans, nous demandons au Viet Nam de nous écouter pour que notre peuple puisse exercer ses droits sans discrimination, a-t-elle conclu.

Mme HOANG THI THANH NGA (Viet Nam) s’est dite favorable à l’esprit de dialogue qui caractérise l’Instance, tout en ne cachant pas ses inquiétudes quant à ses procédures d’inscription.  Elle a aussi regretté le manque d’informations de la part de l’Instance et des invitations qu’elle adresse à des « pseudos-associations autochtones » comme les Khmers Kroms qui affirment « fallacieusement » représenter les peuples autochtones du Viet Nam.  Ces gens, a-t-elle dit, vivent à l’étranger et lancent des accusations « gratuites » en ignorant la situation réelle du pays, a dit la représentante.  La nation vietnamienne s’emploie à panser et ne saurait tolérer que certains se livrent des « manigances politiques » qui perturbent les travaux de l’Instance et lui font perdre son temps.

M. WINDEL BOLIGET, Alliance des peuples de la Cordillère, a évoqué la question des industries extractives, n’étant toutefois pas étonné que les représentants de ces compagnies n’aient pas répondu à l’invitation de l’Instance.  Il a dénoncé l’appui apporté par les forces armées aux activités minières et en a dénoncé les violations « les plus flagrantes ».  Il a réclamé un moratoire afin de parvenir au respect des droits des peuples autochtones.  Dans un contexte de réchauffement climatique, il est inacceptable que des institutions comme les banques continuent de négliger ces questions et d’investir dans le pétrole, a-t-il tranché.  Un rapporteur spécial est nécessaire pour s’occuper du droit à un environnement viable, a-t-il estimé, demandant à l’Instance de débloquer les ressources nécessaires à cette fin.

M. WILTON LITTLECHILD, Organisation des diabétiques autochtones du Canada, a recommandé à l’Instance d’incorporer dans son rapport l’obligation des gouvernements de prendre des mesures de santé en faveur de toutes les populations autochtones.  Il a en effet souhaité que soient mis à la disposition des autochtones, quel que soit leur statut, des médicaments et des traitements contre le diabète.

Mme CHRISTIANIA SAITI LOUWA, Forum Elmolo, a dénoncé les violences et les discriminations subies par les femmes, ciment de la communauté.  Elle a demandé à l’Instance d’appeler tous les pays qui ne l’ont pas encore fait à adhérer à la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.  Les femmes autochtones doivent être associées aux institutions de l’ONU partout dans le monde, a-t-elle ajouté, avant de réclamer des politiques favorables à l’environnement dont la dégradation, due entre autres, à la prospection pétrolière, provoque des maladies inconnues jusqu’ici.

M. RUSSEL DIABO, Réseau indigène sur l’économie et le commerce du Canada, a expliqué que les barrières socioéconomiques que connaissent les autochtones sont dues à une politique du Canada, notamment en matière foncière.  Le Gouvernement établit des conditions de négociations sur les terres qui sont en contradiction avec les dispositions de la Déclaration de 2007 et la jurisprudence de la Cour suprême du Canada.  Toutes les terres sont confisquées par l’État qui offre la possibilité aux Gouvernements régionaux de les distribuer à des tiers.  L’Instance, a-t-il voulu, doit mener une étude sur la politique foncière du Canada, conformément à la Déclaration de l’ONU.

M. HASSAN ID BALKASSM, Membre de l’Instance (Maroc), a constaté que peu de femmes autochtones bénéficiaient d’une instruction.  La responsabilité des États consiste à réduire l’écart entre elles et les autres femmes, a-t-il ajouté, en dénonçant par ailleurs l’accaparement des richesses dans les territoires autochtones.  Les États doivent rendre les territoires spoliés à leurs propriétaires légitimes et reconnaître les peuples autochtones dans les Constitutions nationales.

M. MARCIO AUGUSTO FREITAS DE MEIRA, Président de la fédération brésilienne des questions autochtones, a expliqué que l’éducation et l’école ont une importance particulière pour ces peuples, car elles constituent un moyen d’accès au savoir universel et un moyen de consolider leurs savoirs autochtones.  Il a indiqué que le nombre d’élèves autochtones dans les écoles a augmenté de 48% entre 2002 et 2006, avec un taux de croissance de plus de 10% par an, soit le plus élevé que le pays ait jamais connu.  Au niveau du cycle supérieur, on estime 5 000 le nombre d’étudiants d’origine autochtones.

Autre conquête, a-t-il dit, la prochaine Conférence nationale sur l’éducation scolaire autochtone de 2009 sera destinée à discuter des politiques et de la mise en œuvre efficace du droit à l’éducation.  En matière de santé, il a évoqué la mise en place d’un système de suivi pour les populations autochtones et la chute de la mortalité infantile.

Malgré ces progrès, les peuples autochtones se trouvent encore parmi les populations défavorisées et vulnérables, a-t-il reconnu.  C’est pourquoi le Gouvernement a lancé l’agenda social en leur faveur pour veiller au respect de leurs droits et à leur développement économique, tout en respectant leur volonté.

M. STEDMAN FAGOTH, Ministère des pêches du Nicaragua, a déploré que les femmes soient encore l’objet de discrimination dans certains pays.  Il a souligné que la loi de son pays stipulait la parité absolue 50/50 à tous les niveaux.  Le système régional de santé donne la priorité aux femmes, ce qui bénéficie particulièrement aux autochtones, compte tenu du caractère décentralisé du système national de santé.  Par ailleurs, le droit coutumier a été entériné dans la loi, a-t-il précisé.

M. KOWII ARIRUMA (Équateur) a expliqué que son pays a favorisé le pluriculturalisme dans les administrations.  Nous avons également, a-t-il ajouté, un programme dans le domaine de la santé qui tient compte de la médecine des autochtones dans les hôpitaux publics.  On travaille également à la valorisation des langues autochtones comme en témoigne l’existence d’un centre destiné à la préservation des langues nationales.  Le Gouvernement s’efforce de « décoloniser la mémoire de notre population », a-t-il affirmé, en appelant l’Instance à faire de la protection des langues autochtones une priorité.

M. JITPAL KIRAT (Népal) a appelé de ses vœux un renforcement du soutien onusien aux peuples autochtones.  Ces peuples ont le droit à la dignité et à un traitement respectueux de la part des États où ils vivent, a-t-il dit.  Le Népal est caractérisé par une grande diversité puisqu’il compte une centaine de groupes ethniques, soit 37% de la population, dont 59 sont reconnus en tant qu’autochtones.  Cela n’a pas empêché leur marginalisation dans la vie politique et économique, a-t-il constaté.  Récemment, des mesures ont été prises par l’État pour améliorer le sort de ces populations, a-t-il expliqué, notamment le droit à une instruction dans sa propre langue.  Un plan d’action global a été défini, par lequel le Népal s’est engagé à mettre en œuvre la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.  Un des grands aspects du plan 2007-2010 est son aspect pluriel axé sur le développement des peuples autochtones, a-t-il précisé.  En outre, un système de sécurité sociale a été décidé, notamment au bénéfice d’une dizaine de peuples en péril.

Droits de réponse

Le représentant de la Colombie a voulu répondre aux allégations sur la violence dans son pays.  Tous les Colombiens, a-t-il dit, subissent cette violence qui est le fait des bandes criminelles et des cartels de la drogue.  Nul n’y n’échappe, a-t-il martelé.  Les services de sécurité sont partout sur le territoire pour protéger les populations, et lutter contre les groupes armés.  La sécurité est active et a fait baisser le taux de criminalité, a-t-il affirmé, tout en reconnaissant les défis qui restent à relever.  Répondant à un membre de l’Instance, il a indiqué que son pays reconnait et appuie la Déclaration de 2007, même si ce n’est pas un instrument contraignant.  « On ne peut pas dire qu’en Colombie, les autochtones n’ont pas accès à leur territoire et qu’ils ne sont pas consultés pendant le processus de prise de décisions », a-t-il insisté.

La représentante de l’Espagne a souligné que les droits de l’homme et libertés fondamentales étaient garantis dans son pays, y compris dans la lutte contre le terrorisme.  Elle a déploré les tentatives visant à transformer l’Instance en une plateforme politique, risquant de nuire à sa crédibilité.

La représentante du Viet Nam a demandé à l’Instance de faire preuve de prudence dans le choix des participants à ses débats.  Le Viet Nam, a-t-elle avoué, s’oppose à la présence de l’association des Khmers Kroms.  Elle s’est demandé comment une organisation, basée depuis plusieurs décennies en dehors du pays, pouvait affirmer parler au nom d’un peuple autochtone.  Elle a par ailleurs évoqué les progrès faits au Viet Nam en faveur des minorités autochtones, en particulier les enseignements spécifiques dans pas moins de huit langues.  La « Voix du Viet Nam » émet quant à elle en 13 langues, a ajouté la représentante, avant de réaffirmer la détermination de son pays à respecter les droits de tous les groupes ethniques du pays.

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