DEFAITE ELECTORALE DES SOUVERAINISTES QUEBECOIS AUX ELECTIONS FEDERALES CANADIENNES

Le Bloc québécois – qui est la représentation électorale des souverainistes québécois pour le scrutin au Parlement fédéral du Canada – a subi, ce 2 mai 2011, une cuisante défaite qui se traduit par l’élection de seulement quatre députés fédéraux au Québec, contre 47 obtenus en 2008 !…

Ce que l’on a appelé une vague orange, qui est la couleur du NPD (Nouveau Parti Démocratique), un mouvement politique de sensibilité social-démocrate, qui s’est vaguement paré de revendications pro-Québec, a bouleversé la donne dans le paysage politique québecois. Ce parti, qui ne dispose à ce jour que d’un seul représentant à l’Assemblée nationale du Québec, se retrouve avec 58 députés au Parlement fédéral de Ottawa, en ayant visiblement captés beaucoup d’électeurs souverainistes qui se portaient jusqu’ici sur le Bloc québécois.

Ce genre de bouleversement devrait susciter bien des interrogations – en Pays Basque comme partout où s’exprime une revendication de reconnaissance des droits nationaux – sur les vicissitudes électorales et sur les changements qui peuvent s’opérer dans la donne socio-politique. Un électorat n’est jamais acquis – et moins encore le fait qu’il puisse être en position majoritaire – et s’il y a une leçon à tirer de la déconfiture des souverainistes québecois, c’est que les droits d’une nation doivent, en toutes circonstances, être reconnu comme imprescriptibles et inaliénables, et ne pas avoir à se retrouver otages des aléas électoraux.

Pour essayer de comprendre tout ce qui a pu concourir à la dégringolade électorale des souverainistes du Québec, nous vous proposons çi-après, l’analyse d’un philosophe québecois, publiée dans le quotidien Le Devoir, et qui eu l’amabilité de nous autoriser à la répercuter sur ce blog. Qu’il en soit remercié.

Allande SOCARROS

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LA SAVOIE : DE LA DESANNEXION A LA FEDERATION

Logo_savoie-300x300Dans le cadre de la série « L’autonomie : points de repéres pour nourrir la réflexion », nous avions publié, le 17 avril 2010, un dossier consacré aux annexions par la France des territoires de la Savoie et de Nice. On peut utilement s’y reporter pour comprendre le contexte et les enjeux des efforts menés à ce jour par les « désannexionistes » – c’est ainsi qu’ils se définissent – savoisiens (de préférence à « savoyards »), et des indépendentistes niçois. Ceux-çi se référent en particulier au Droit International pour mettre en exergue la caducité du Traité d’Annexion de 1860, qui, il faut bien le dire, fut une forfaiture des plus achevées.

Le texte que nous proposons çi-après à votre information et à votre réflexion entre dans le cadre des projets institutionnels ou propositions politiques de pays ou nations pris dans les filets uniformisateurs/centralisateurs de la France. A dire vrai, il n’est ni l’un ni l’autre, mais bien, comme indiqué dès son intitulé, un « Projet de Constitution de la Fédération Savoisienne ». A la lecture de ce document très élaboré et précis, on notera la référence, à plusieurs reprises, à la pratique des « votations », c’est à dire des consultations populaires ayant cours en Suisse… et pas toujours pour le meilleur des usages !

Il n’est guère étonnant que les désannexionistes savoisiens se référent à ce système de démocratie participative en vigueur dans le pays précité, car des sondages d’opinions démontreraient qu’une majorité de savoisiens verraient d’un bon œil… le rattachement à la Confédération Helvétique. Ainsi, une enquête d’opinion réalisée en juillet 2010 par l’institut SwissOpinion et publié

Par l’hebdomadaire Weltwoche de Zürich faisait apparaître que dans les départements 73 et 74 (pour parler jacobin…), 48% des sondés souhaitent que la Savoie soit incorporée à la Suisse; 39% sont contre et 13% indécis. Même s’il faut prendre de tels résultats avec prudence – un sondage n’étant qu’une photographie de l’opinion publique à un moment donné, et en se disant que ladite enquête n’avait pas d’incidences réelles, comme pour un référendum – , cela traduit au moins une inclinaison ou un intérêt marqué de la part de la population savoisienne envers « l’option suisse ».

Evidemment, on peut penser qu’au vu de toute sa tradition historique, des crispations nationalistes franchouillardes de toutes ces dernières années ainsi que de la très nette tendance actuelle à une recentralisation politico-institutionnelle, la France est à des années-lumières de concevoir de telles évolutions. Il faut se dire cependant que des statu-quo que l’on pensaient immuables peuvent être remis en cause à brêve échéance et que, par exemple, la construction européenne – aussi peu satisfaisante qu’elle soit encore aujourd’hui – à des effets centrifuges sur l’archaisme français en matière institutionnelle.

 

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L’OCCITANIE? DEUX PROJETS POLITIQUES POUR LE RENOUVEAU D’UNE VIEILLE NATION

Dans la continuité de notre série concernant les projets politico-institutionnels ou propositions de statuts d’autonomie pour des pays sous tutelle de la République Française, nous vous proposons d’aller voir aujourd’hui du coté de l’Occitanie. Dans cette vieille et vaste terre, à la tradition démocratique bien plus ancienne que celle de l’auto-proclamée «Patrie des Droits de l’Homme», existe, à notre connaissance, deux structures politiques que l’on peut qualifier d’autonomistes ou assimilés : le Partit Occitan (PO) et le Partit de la Nacion Occitana (PNO). Le premier est membre de la fédération ‘Régions et Peuple Solidaires’ (RPS), dont font partie, entre autres, EAJ-PNV (Euskal Herria), le PNC (Corse) et l’UDB (Bretagne). Le second est un mouvement assez ancien – crée en 1959 –, dont l’un des fondateurs et le pilier idéologique fut François Fontan, promoteur du concept de l’etnisme.

Les deux sensibilités, bien qu’apparemment politiquement proches, ont élaboré chacune un projet politico-institutionnel : le PO, sous forme d’un «Projet de statut d’autonomie pour l’Occitanie» datant de 1980 ; le PNO, sous la dénomination d’un «Programme national» adopté en 2009. Pour ce qui est du PNO, il faut préciser qu’il ne revendique pas stricto-sensu la mise en place d’une autonomie occitane, mais l’avènement d’une «République fédérale occitane, souveraine, membre de l’Union Européenne et de l’ONU».

Deux revendications politico-institutionnelles aux caractèristiques très similaires dans un pays où l’expression politique pour une émancipation occitane a du mal, au moins en apparence, à rencontrer une large adhésion populaire… On dit qu’abondance de biens ne nuit pas, mais, en l’occurrence, on peut se demander si cela concourt à éclairer des consciences profondément colonisées et éclatées en particularismes et donc aux antipodes d’un sentiment d’appartenance à une Nation privée de ses droits fondamentaux. Quand au «Gouvernement Provisoire Occitan» inspiré et constitué, au moins en partie, par le PNO, sans aucunement prétendre donner des leçons, on peut tout de même se demander si la plus judicieuse des stratégies politiques est celle de commencer par la fin ?

Néammoins, à la lecture des documents que nous reproduisons çi-après, les mouvements politiques abertzale constitués en Pays Basque nord, auraient tort de les considérer avec commisération. En matière d’organisation et de travail politique, la situation de délitement dans laquelle se trouve, depuis bien des années maintenant, le mouvement abertzale, ne l’autorise certes pas à servir d’exemple ailleurs. Ce qui constitue la réalité abertzale et son influence indéniable dans la société du Pays Basque nord, c’est la grande et importante implication de militants – ce terme n’étant pas forcément à prendre dans son sens politique – dans tous les secteurs qui concourent à faire vivre ce pays. La grande majorité de ces abertzale, acteurs de la sociéte dans laquelle ils vivent et qui ne passent pas leur temps à refaire le monde en petit comité et en cercle fermé, font tout ce qu’il peuvent avec les limites inposées par les structures – institutionnelles en particulier – dans lesquelles ils sont impliqués. Ils font au maximum, de manière isolé, sans cadre politique fédérateur auquel ils pourraient en permanence se référer, sur lequel ils pourraient s’appuyer.

Alors, pour ce qui est de la défense et de la promotion de nos droits nationaux, pour l’écho et l’influence que nous avons dans la société, nous sommes certes plus en avance que les occitans… mais il semblerait bien que nous ayons arrêté de progresser sur la voie de l’émancipation, de la prise en main de nos affaires, du devenir collectif, de la possibilité de choisir… en un mot : de l’autonomie.

 

Allande SOCARROS (suite…)

BRETAGNE : L’UDB OU L’AUTONOMISME PRAGMATIQUE

L’Union Démocratique Bretonne (UDB) est l’un des plus anciens mouvement politique pronant l’autonomie en tant qu’instrument d’autogouvernement pour les bretons, d’origine ou d’adoption. Il a une implantation notable, en terme de militants et d’élus, sur l’ensemble des cinq départements que Paris avait crées dans son optique habituelle du «diviser pour mieux régner». L’UDB a aussi, depuis toujours, une certaine culture de la gestion politique qui lui a fait choisir de quitter les terrains de la seule incantation pour les voies du pragmatisme. De la sorte, L’UDB, fidèle à ses aspirations sociale-démocrates, a opté pour des alliances électorales avec des forces politiques françaises de gauche, essenciellement le Parti Socialiste. Il a ainsi pu obtenir un certain nombres d’élus, principalement dans les municipalités. Cela lui a valu longtemps, au mieux les sacarmes des indépendantistes de gauche bretons, au pire une certaine animosité de la part de ces mêmes milieux aux yeux desquels il n’était pas loin de passer pour «traitre à la cause». (suite…)

CORSE : «DEVOLUTION»… POUR NE PAS DIRE «AUTONOMIE» !

Nous nous proposons, dans le cadre de la série «L’autonomie : points de repères pour nourrir la réflexion», de porter à la connaissance des lecteurs du blog Autonomia Eraiki les divers projets d’autonomie ou d’institutions spécifiques élaborés par des mouvements ou structures politiques oeuvrant, face à Paris, pour le recouvrement et le développement de leurs droits nationaux (certains d’entre-eux se limitent toutefois à des aspirations à caractère régional).

Nous commencerons ce nouveau volet d’éléments de réflexion par le projet politique élaboré par les indépendantistes corses regroupés dans la structure électorale Corsica Nazione et le mouvement politique Independenza (aujourd’hui Corsica Libera).

Il faut commencer par reconnaître que le document en question est très travaillé et sérieusement argumenté. Manifestement, il y a là derrière un grand travail de réflexion et une réelle connaissance des sujets abordés, même ceux les plus pointus. Donc, c’est bien un projet tout à fait crédible et à même d’emporter l’adhésion d’habitants de la Corse ne se reconnaissant pas à ce jour comme indépendantistes ou autonomistes.

Et ceci rend d’autant plus regrettable la teneur du texte introductif dans lequel les rédacteurs se livrent à des contorsions sémantico-dialectiques pour expliquer en quoi ce projet politique ne peut pas être qualifié de projet d’autonomie. Si l’on résume et schématise leur propos, l’autonomie est un concept trop flou, trop ambigu, et qui ne garantie pas une évolution vers la souveraineté ou vers plus d’exercice d’autogouvernement. Aussi, les rédacteurs du projet Corsica Nazione-Independenza préférent le définir comme une revendication de «dévolution», en faisant référence au cadre institutionnel qui régit aujourd’hui les autonomies écossaises et galloises.

Si l’on voulait verser dans un certain mauvais esprit, et en nous basant sur le sens en français du mot «dévolution» : «Attribution, transmission d’un bien, d’un droit, d’une personne à une autre», on a véritablement du mal à comprendre en quoi ce concept est plus en phase que celui d’autonomie avec une aspiration émancipatrice… Une dévolution n’est-elle pas la démarche de quelqu’un qui consent à laisser à un autre des droits, des prérogatives ou des pouvoirs ? En préconisant ce schéma, ne reconnaît-on pas implicitement que ces droits, prérogatives ou pouvoirs étaient naturellement ceux de l’entité qui accepte de nous les attribuer ?

Le préambule de ce projet politique poursuit dans le même registre du sophisme en considérant, qu’à priori – de par des expériences conduites ailleurs –, une autonomie n’est que peu succeptible d’évolution. C’est penser que tout est toujours figé sur un modéle unique, que tout relève du même moule, que l’autonomie est donc l’acceptation de rester dans une relation tutélaire. Il n’en est bien évidemment pas ainsi, car l’autonomie peut parfaitement être un cadre institutionnel évolutif et doit même être conçu comme tel. En outre, pour ce qui est des vertus que Corsica Nazione-Independenza semble attribuer à la dévolution, il est franchement difficile de percevoir en quoi et sur quel principe, ce modèle aurait un caractère plus évolutif que l’autonomie…

De fait, il semblerait tout simplement que les indépendantistes corses aient quelque mal à admettre que l’autonomie portée depuis des décennies par d’autres forces politiques est une voie qui pourra permettre à la Corse d’avoir les moyens de prendre ses affaires en main. Car c’est là qu’est la vrai question, pas dans les faux-fuyants relevant de compétitions politiques stériles.

ALLANDE SOCARROS

N.B: Certaines opinions ou analyses émises dans ce texte introductif étant succeptibles de gêner aux entournures des membres de ‘Autonomia Eraiki’, j’ai choisi de signer le préambule en question. Je le ferai dorénavant pour tout article d’introduction de la série « L’autonomie : points de repères pour nourrir la réflexion ».

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